Fatna, s’était levée dés l’aube pour pouvoir s’occuper des animaux ; le chien et l’âne avaient faim ;
c’était un vrai plaisir de profiter de cet air si pur ; sa limpidité présageait encore une journée ensoleillée ;
elle se demandait toujours que faire pour rendre heureux Amine ; il avait quitté la maison tellement tôt ce matin ; il devait s’occuper des 17 ha octroyés par le gouvernement ; aujourd’hui c’était jour de prière il rentrerait plus tard ;
les enfants avaient quitté la maison et elle se retrouvait seule avec cet homme que ses parents lui avaient choisi, il y a déjà si longtemps ;
finalement elle s’était accommodée de cette union ; il avait été bon pour elle ;
bien sûr la maison n’était pas chauffée, mais le temps était plutôt clément cette année ;
même si il n’y avait plus d’électricité depuis le départ des « françaouis » elle avait de la musique avec cet appareil qu’il avait ramené de Meknès l’année dernière ; la télévision aussi ; et puis ils avaient même deux batteries pour faire fonctionner ses appareils en 12 v ;
c’était bien ;
la récolte de pommes de terre était bien à l’abri de l’obscurité dans le hangar ; cela leur assurerait de délicieux tajines ; et avec les légumes du jardin tout irait bien ; des artichauts, des petits pois (si par chance Amine ramenait une perdrix), des cardes… c’est vrai que la recette des cardes qu’elle tenait de sa mère était savoureuse ;
tiens une voiture s’arrête le long de l’allée ;
Fatna ne reconnaît pas cette voiture ;
rares sont les gens qui passent par là ;
quelle étrange histoire ! l’européenne dit qu’elle a vécu ici étant enfant, dans notre maison ; que c’était la ferme de son grand-père…
j’y étais moi aussi, j’aurais pu la voir, mais j’habitais au douar chez mon père ; nous devons avoir le même âge….. elle a l’air si émue…
je m’en vais lui proposer du thé, Amine m’a rapporté de la menthe ; heureusement que le pain vient de sortir du four et qu’il me reste quelques « zitouns » de la coopérative agricole ;
c’est drôle, je me rappelle maintenant que c’est son grand-père qui a planté les oliviers ; c’est ce que me disait mon père lorsque j’étais petite fille ;
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Vous avez besoin
500 g de farine de blé
200 g de semoule de blé fine « Smida marocaine «
1 c. à café de sel
1 c. à café de levure de boulanger
eau
Au Maroc, le plat utilisé pour faire le pain et la pâtisserie s’appelle un gasaâ ; en fait, c’est un récipient peu profond avec une base assez large qui a de nombreuses utilisations dans une maison ;
j’ai eu la chance de récupérer celui utilisé chez moi “depuis, depuis” (expression de l’Afrique de l’Ouest qui signifie depuis “Kala-Kala” ; bon, depuis très longtemps si vous préférez);
l’usage lui a conféré une patine inimitable ; l’huile et le beurre ont nourri tout à loisir le bois ; la main de la cuisinière y a laissé son empreinte ;
avec la farine et la semoule formez un puits, y déposer le sel et la levure ;
Ajoutez l’eau « qui rentre » pour obtenir une pâte souple ;
pétrissez en pensant bien à ramener la boule de pâte vers vous ; repoussez-là en y enfouissant la base de la paume de la main ;
cette opération dure environ 5 mn ; recouvrez d’un linge propre et laissez lever dans un endroit tiède et à l’abri des courants d’air ;
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Le pain « tafernout « cuit dans un four traditionnel ; allumez le feu de bois dans un côté du four ; dans l’autre déposez des cailloux ronds ; laissez leur le temps de devenir brûlants ;
lorsque la pâte à pain commence à lever, déposez la gasaâ ainsi qu’ un bol empli d’eau à côté du four ;
prenez dans votre main mouillée un peu de pâte que vous déposerez sur une petite planche ronde ; tâchez d’en faire une galette ronde du diamètre d’une assiette avec la main toujours humide ; saupoudrez de semoule fine et faites glisser ce pain sur les galets bouillants ;
lorsque le pain est cuit, le retirer du four en enlevant les galets qui y sont encore accrochés ;
dégustez sans attendre avec un bol d’olive ou bien en accompagnement d’un tagine ;
pour tenter de reproduire cette recette, magnifique de simplicité, j’ai utilisé mon four traditionnel ;
je l’ai fait chauffer très fort, et j’y ai ai posé un carreau en terracotta ;
pour cette technique, qui ressemble à la façon dont les pizzaïolo (i?) cuisent les pizzas, j’utilise un carreau de ma région ;
ils sont issus d’un village de l’Entre-Deux-Mers : Gironde/Dropt ; il y existe une longue tradition avec de nombreuses carrières à ciel ouvert ;
le carreau (30×30 cm ) est posé sur la sole du four, chauffé puis la pâte mise en forme est simplement dessus ; cela remplace idéalement les galets….
le piment d’Espelette (tellement utilisé dans mes recettes ) est remplacé ici par du cumin ;
J’ai tellement aimé ça !
17 commentaires
c’est tellement beau … je succombe 😉
je rougis…… merci !
Quel beau billet !
merci jeune femme !
Est ce la recette que je cherche depuis des siècles, je la fais cette semaine. Vite vite. Miam ! Avec de la cervelle de Canut c’est…
C’est le genre de texte qu’on se garde pour un moment de calme, aussi savoureux que le pain et les zitouns.
Sur la pierre a pizza de mon four, ca devrait marcher aussi.
dans le train alors ? 😉
oui probablement sur la pierre à pizza, ce sera parfait !!!
J’aime beaucoup venir te lire ….quel enchantement !
Merci pour les recettes toujours hors sentiers battus !
Alors un petit tag par amitié !
http://lejournalgourmanddesacha.blogspot.com/
A+SACHA
merci Sacha !! 🙂
Beau billet, qui me rappelle bien des hsitoire
visiblement, nous avons les mêmes histoires familiales….. 😉
J’ai aimé lire ton récit, cette histoire qui audelà des mots fair bouger délicatement des souvenirs lointains, vécus ou ressentis. Vient alors cette recette de pain fait maisn, fait maison, fait four local!
Vraiment merci pour ce doux moment de lecture.
mille mercis ! je suis heureuse que cela t’ait plu……
Si tu savais depuis quand je n’ai pas entendu le mot : Gasaâ …